L’Agora d’Argos

Responsables et contacts : Anne Pariente (chercheuse associée UMR 5138 ArAr) & Marcel Piérart (professeur émérite de l’université de Fribourg)

Collaborateurs : D. Bartzis (architecte diplômé de l’École polytechnique d’Athènes, université de Thessalie), V. Evgenikou (topographe diplômée de l’École polytechnique d’Athènes), A.-S. Martz (céramologue indépendante, chercheuse associée HiSoMA), E. Pinakoulaki (chercheuse indépendante, étude du mobilier en verre) & Y. Varalis (professeur à l’Université de Thessalie, étude des lampes)

Autres participants : P. Marchetti (professeur émérite des Universités de Namur et de Louvain, étude numismatique) & C. Weber-Pallez (maîtresse de conférences Patrimoine Littérature Histoire – Université de Toulouse Jean Jaurès)

Remerciements :
Nous adressons tous nos remerciements à l’Éphorie des Antiquités d’Argolide pour la qualité de son accueil et son aide précieuse, , tant dans les réserves du musée que sur le terrain.


L’agora d’Argos, identifiée par W. Vollgraff dès le début des fouilles qu’il y mène au nom de l’École française d’Athènes entre 1903 et 1912, n’a été réinvestie qu’en 1952-1953 par une équipe constituée de G. Roux, P. Courbin, P. Charneux, J. Bingen, Ph. Martin et L. Tousloukoff, puis par J.-Fr. Bommelaer et J.-P. Sodini en 1968. De nouvelles séries de campagnes sont menées à partir de 1974 dans la partie sud du terrain par M. Piérart et J.-P. Thalmann, puis à partir de 1985 sur deux terrains nouvellement expropriés dans la partie nord par A. Pariente, en collaboration avec C. Pitéros (Δ’ ΕΠΚΑ) entre 2003 et 2008.

Si, dans le tissu urbain qui l’entoure, l’intégralité de l’agora antique n’est pas accessible à la fouille, et que l’exploration du terrain disponible n’est toujours pas achevée, le site a déjà livré quelques pans majeurs de son histoire monumentale. Au cours de son existence plus que millénaire (VIIe s. av. J.-C.-IVe s. ap. J.-C.), le centre politique et religieux de la cité a connu bien des vicissitudes et des remaniements avant d’être grignoté par des installations artisanales et domestiques à l’époque protobyzantine.

Deux de ses édifices, la Salle hypostyle [SH], dont la construction au 2e quart du Ve s. av. J.-C. accompagne l’émergence de la démocratie, et le luxueux nymphée rond [R], qui s’installe à la fin du IIe-début du IIIe s. ap. J.-C. sur une fondation plus ancienne, ont fait l’objet de publications séparées.

Situé dans une cuvette inondable, l’occupation du site de l’agora est attestée dès l’époque archaïque par un canal de drainage à ciel ouvert (qui sera ensuite remplacé par un important système de collecteurs couverts), les vestiges de structures rectangulaires antérieures au portique sud qui les recouvrira, ainsi que les bornes d’un hérôon des « Sept contre Thèbes » [H] vu par Pausanias lors de son passage à Argos au IIe s. ap. J.-C.

Dans le portique sud (grand bâtiment bordé sur trois côtés de portiques de style dorique), cinq grandes phases architecturales ont été identifiées : le bâtiment initial [P], du 3e quart du Ve s. av. J.-C., connaît des ajouts et des modifications à l’époque classique, avant sa transformation en palestre à l’époque impériale et son extension jusqu’à la Salle hypostyle au IIIe s. [PR], puis la transformation de sa partie orientale en thermes [PT], alimentés par un nouvel aqueduc qui réutilise la frise dorique de la colonnade nord.

Un autel à triglyphes bas est élevé au milieu du Ve s. av. J.-C. dans la partie nord du site, selon une orientation préexistante. Il sera intégré dans la colonnade sud du portique de style dorique édifié autour de 300 av. J.-C. [K], époque à laquelle Argos, prenant en charge l’organisation des Jeux Néméens, se dote également de son imposant théâtre. Ce portique nord forme avec l’exèdre en arc outrepassé de 28 m de diamètre [O] qui lui est accolée un ensemble monumental à ce jour sans parallèle. L’intérieur du portique, vraisemblablement détruit (par un incendie ?) puis largement remblayé à la fin de l’époque hellénistique, connaîtra plusieurs remaniements à l’époque romaine [KR].

Au plus tard à l’époque hellénistique, l’agora d’Argos est dotée d’un dromos (piste de course) [S], qui sera en usage jusqu’à son oblitération, dans la 2e moitié du IIe s. ap. J.-C., par la construction d’un monument carré [C], converti en nymphée puis en habitation dans ses états ultérieurs. La piste est bordée au nord par des bases monumentales : l’une [D], qui subira deux transformations, date du IVe s. av. J.-C. ( ?), l’autre [M] du IIe s. ap. J.-C.

Il semble qu’il faille lier à la disparition des cultes païens et de leurs édifices en même temps qu’aux destructions provoquées par des catastrophes naturelles (séismes de la fin du IVe s. ap. J.-C.) un certain nombre des réaménagements de la fin de l’Antiquité. Si les monuments ruinés de l’agora classique et hellénistique servent alors de carrière et que le site est largement remblayé, les vestiges dégagés attestent à cette époque une importante activité édilitaire.

Une équipe de spécialistes, aujourd’hui réunie sous le pilotage d’A. Pariente et M. Piérart, mène, avec l’étude architecturale qui manquait pour une compréhension approfondie des vestiges et la restitution de leurs diverses phases, l’étude de différentes catégories de matériel (céramique, verre, lampes en terre cuite). Outre préciser les articulations chronologiques, que les vagues d’occupation et les réaménagements successifs de l’espace rendent complexes à appréhender dans leur globalité, elle permet d’enrichir la connaissance de l’artisanat argien et de sa diversité.

Les études engagées au cours des campagnes récentes et à venir concernent les réaménagements du Bas-Empire attestés dans l’exèdre et la Salle hypostyle, les états récents de l’ensemble portique-exèdre, l’étude du portique sud et du monument carré et de leurs différents états, ainsi que celle des petits édifices situés en limite nord de la piste de course. Elles visent à une publication globale de cet espace essentiel de la cité antique.

Les relevés photogrammétriques par drone réalisés en 2024 et 2025 contribueront par ailleurs à la mise en place du SIG argien.