Le lion d’Amphipolis

Repérés par des soldats grecs puis britanniques pendant les guerres des Balkans de 1912-1913 et la Première Guerre mondiale, fouillés partiellement par les archéologues grecs Georgios Oikonomos et Anastasios Orlandos en 1913, les vestiges du monument au lion d’Amphipolis ne font l’objet d’aucune investigation approfondie avant juin 1930. À cette date, deux membres de l’École française d’Athènes, Paul Collart et Pierre Devambez, dans le cadre d’une expédition scientifique dans la région du Strymon.
Repérés par des soldats grecs puis britanniques pendant les guerres des Balkans de 1912-1913 et la Première Guerre mondiale, fouillés partiellement par les archéologues grecs Georgios Oikonomos et Anastasios Orlandos en 1913, les vestiges du monument au lion d’Amphipolis ne font l’objet d’aucune investigation approfondie avant juin 1930. À cette date, deux membres de l’École française d’Athènes, Paul Collart et Pierre Devambez, dans le cadre d’une expédition scientifique dans la région du Strymon, et avec l’aide d’ingénieurs de la compagnie américaine Monks-Ulen, visitent le site de « Marmara », sur la rive occidentale du fleuve [fig. 1EFA cliché n° 9.714h : Bloc de la tête du lion (face inférieure), juin 1930.-2EFA cliché n° 9.714j : Patte arrière droite du lion (face intérieure) avec P. Devambez au second plan, juin 1930.], et donnent la première description détaillée des fragments du lion et de la fondation de la base avoisinante, qu’ils publient dans le Bulletin de correspondance hellénique en 1931.
 
L’intérêt des ingénieurs de la société Ulen Roy W. Gaussman et William J. Judge pour le redressement du monument conditionne le financement d’une fouille de quatre jours, entreprise en juin 1934 par les archéologues français de Philippes. Michel Feyel, en collaboration avec Henri Ducoux, architecte de l’EFA, dégage, dessine et photographie les dix blocs du lion et la base, qu’ils attribuent alors au monument [fig. 3EFA MACED 1-1934 : Extrait du catalogue des blocs du lion, par H. Ducoux [septembre 1934].-4EFA MACED 1-1934 : Photographie de la tête du lion (de face), extraite du catalogue des blocs du lion, par H. Ducoux [septembre 1934].]. L’étude architecturale [fig. 5EFA MACED 1-1934 : Extrait de la note d'étude d'H. Ducoux, 26 septembre 1934.] qu’en fait H. Ducoux aboutit, en septembre de la même année, à une première proposition de restitution du monument [fig. 6EFA plan n° 646 : Plan et élévation Est, premier essai de restitution, par H. Ducoux [c. 1934-1935].-7EFA plan n° 652 : Élévation Ouest, essai de restitution du monument, par H. Ducoux [c. 1934-1935].] dont il estime la reconstruction, ainsi que le réaménagement du site, à 317 300 drachmes [fig. 8EFA MACED 1-1934 : Devis estimatif d'H. Ducoux, 26 septembre 1934.].
 
Lincoln MacVeagh, ministre des États-Unis en Grèce, fervent partisan de l’anastylose du monument dès 1933, contribue au projet en levant les fonds nécessaires à sa réalisation. En bonne entente avec Pierre Roussel et Robert Demangel, directeurs successifs de l’EFA, il présente le projet lors de plusieurs conférences [fig. 9EFA 7 ADM n.c. : Carton d’invitation à la conférence donnée par L. MacVeagh à l'Institut de correspondance hellénique, 19 février 1937.] et réussit à rassembler le montant prévu par H. Ducoux. Dans une lettre du 9 mars 1936 à R. Demangel, L. MacVeagh propose de verser 150 000 drachmes pour commencer les travaux ; un compte est ouvert à cet effet à la Banque d’Athènes. Tandis que deux sculpteurs grecs, Georgios Kastriotis et Kostis Papachristopoulos, sont engagés pour étudier la restauration du lion, l’École française demande une nouvelle autorisation de fouille et d’étude du monument [fig. 10 EFA 7 ADM 4 : Demande d'autorisation de fouilles du site, adressée par le directeur de l'EFA au service archéologique grec, 21 mars 1936. ].
 
Entre temps, deux visites de L. MacVeagh à l’EFA, dont l’une avec l’archéologue américain Oscar Broneer, portent la discussion sur un autre aspect de la restauration du lion : les modalités de la collaboration, tant financière – en cas de dépassement du devis initial d’H. Ducoux – que scientifique, entre les écoles française et américaine. Les conditions fixées par R. Demangel sont acceptées par L. MacVeagh et Edward Capps, alors directeur de l’École américaine : le droit de poursuivre les recherches sur place, de publier les résultats de cette recherche et le monument restauré est accordé aux Français ; les Américains assurent, quant à eux, la responsabilité financière de la restauration [fig. 11MACED 1-1935-1936 : Lettre adressée par R. Demangel, directeur de l'EFA, à L. MacVeagh, ministre des États-Unis en Grèce, 6 avril 1936.-12MACED 1-1935-1936 : Lettre adressée par R. Demangel, directeur de l'EFA, à L. MacVeagh, ministre des États-Unis en Grèce, 4 mai 1936.].
 
En juin 1936, l’EFA, en collaboration avec l’École américaine, reprend ses travaux à Amphipolis. Jacques Roger [fig. 13EFA cliché n° N579-013 : J. Roger (3e à gauche) le 7 septembre 1940, jour de son départ de l'EFA, avec H. Ducoux (1er à droite).] et O. Broneer retrouvent une vingtaine de petits fragments du lion, précisent les dimensions de la base du monument, ainsi que la position du lion [fig. 14EFA MACED 1-1935-1936 : Travaux de nettoyage et de nivellement du site : extrait du rapport manuscrit de J. Roger, 15 juin 1936.]. Ces nouvelles découvertes invalident la première hypothèse de restitution du monument, comme le souligne R. Demangel dans son rapport d’activités de l’année 1936.
 
À la fin de cette mission, les Américains projettent de ne reconstruire que le lion, dont la restitution s’avère plus sûre que celle de l’ensemble du monument. Dans les mois qui suivent, en vue de l’anastylose, une maquette en plâtre grandeur nature du lion est réalisée in situ par Andreas Panayotakis, sculpteur du musée national d’Athènes, engagé par O. Broneer. Parallèlement, sur la conviction de J. Roger, partagée par O. Broneer, qu’il s’agit d’un hérôon sous forme de mausolée, H. Ducoux propose de nouvelles restitutions du monument [fig. 15EFA plan n° 650 : Élévation Ouest, essai de restitution du monument en mausolée à six colonnes, par H. Ducoux [c. 1936].-16EFA plan n° 4869-1 : Croquis de l'élévation Ouest, essai de restitution du monument en mausolée à quatre colonnes et chambre funéraire, par H. Ducoux [c. 1936].]. Toutefois, bien que jugeant cette approche plausible, les fouilleurs français et américains optent pour une solution plus simple, moins coûteuse : une base, sur le modèle de celle de Chéronée, dont H. Ducoux dessine deux variantes [fig. 17EFA plan n° 654 : Plan et élévations Sud et Ouest, essai de restitution du monument, par H. Ducoux [c. 1936].-18EFA plan n° 647 : Croquis d'un essai de restitution du monument, par H. Ducoux [c. 1936].]. C’est finalement la seconde variante [fig. 18EFA plan n° 647 : Croquis d'un essai de restitution du monument, par H. Ducoux [c. 1936].], encore modifiée lors de l’anastylose du monument à l’automne 1937, qui est retenue. La presse, francophone comme hellénique, se fait l’écho de cet évènement, qui donne lieu à des débats passionnés sur la date et la destination du monument [fig. 19EFA MACED 1-1935-1936 : Tribune libre d'A. Philadelpheus, directeur du musée d’Athènes, en réponse à un article paru le 3 décembre 1937 dans "Le Messager d’Athènes", s. d.].
 
J. Roger, d’abord dans son mémoire de membre de deuxième année, puis dans un article du Bulletin de correspondance hellénique (1939), et O. Broneer dans une monographie (1941) rédigent la publication finale du monument au lion, chacun en proposant une restitution différente. Stella Grobel Miller, dans le tome 27 d’Αρχαιολογικόν δελτίον. Α, Μελέται, reprendra l’étude du monument en 1973.
DOCUMENTS D’ARCHIVES CONSERVÉS À l’EFA :
Voyage de P. Collart et P. Devambez dans la région du Strymon :
MACED 1-4 : Photographies prises [par P. Collart] (juin 1930). Les négatifs sont conservés à la photothèque sous les cotes 9714 d-j.
PHILIPPES 2-C PHI 24 B : Carnet de P. Collart [juin 1930].
 
Fouilles dAmphipolis, par M. Feyel et H. Ducoux, et premiers projets de restitution du monument au lion, par H. Ducoux :
PHILIPPES 1-1934, dos. 4 : Rapport de fouilles manuscrit de M. Feyel (août 1934).
MACED 1-1934 : Note d’étude du monument, devis, catalogue des blocs, avec photographies, par H. Ducoux (sept. 1934). Les négatifs des photographies du catalogue sont conservés à la photothèque sous les cotes 10324-10369.
2 ADM 19 : Rapport du directeur de l’EFA sur les travaux et les fouilles de l’École en 1934.
Les documents graphiques des premiers projets d’H. Ducoux sont conservés à la planothèque sous les cotes 652 et 656-658.
 
Travaux de nettoyage et de nivellement d’Amphipolis, par J. Roger et O. Brooner, et seconds projets de restitution du monument au lion, par H. Ducoux :
7 ADM 4, dos. MACED. : Demande d’autorisation de fouilles du site d’Amphipolis (21 mars 1936).
MACED 1-1935-1936 : Correspondance entre L. MacVeagh, P. Roussel et R. Demangel, croquis d’H. Ducoux, rapport de fouilles manuscrit de J. Roger, coupures de presse francophones et helléniques (oct. 1934-déc. 1937).
2 ADM 19 : Rapports du directeur de l’EFA sur les travaux et les fouilles de l’École en 1936 et 1937.
Les documents graphiques des seconds projets d’H. Ducoux sont conservés à la planothèque sous les cotes 24-26, 646-647, 649-651 et 653-655. À noter également, sous la cote 4869, 32 croquis préliminaires aux différents projets de restitution du monument au lion [c. 1934-1938].
 
SOURCES COMPLÉMENTAIRES :
Grèce : École américaine (archives administratives, archives des fouilles d’Amphipolis, papiers O. Brooner, documents photographiques ; voir aussi : Vogeikoff-Brogan (Natalia), « The Pride of Amphipolis », From the Archivist’s Notebook, 15 sept. 2014 » [blog consulté le 8 oct. 2014]) ; Archives générales de Grèce / Archives départementales de Serres (dossiers relatifs aux travaux de la société Monks-Ulen).
France : Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine (archives financières et comptables de l’EFA) ; Institut national de l’histoire de l’art, Paris (plaques de projection de la faculté d’art et d’archéologie).
Suisse : Institut d’archéologie et d’histoire ancienne de l’université de Lausanne (fonds P. Collart).
États-Unis : Bibliothèque de l’université de Princeton (papiers L. MacVeagh).